Le reporter-photographe Olivier Voisin, grièvement blessé en Syrie, est décédé en Turquie où il avait été transporté. Sa mort va allonger la trop longue liste des journalistes morts pour informer ; notamment dans les zones de conflit.
Mais, au-delà de la profonde émotion suscitée par la perte d’un collègue, soucieux d’aller au plus près de l’actualité pour informer complètement, ne faudrait-il pas s’interroger sur les conditions d’exercice de la profession, surtout en zone de guerre.
En effet, Olivier Voisin était indépendant. Pourquoi ? Parce que les éditeurs n’embauchent plus de reporters-photographes permanents, s’en remettant de plus en plus à des journalistes dits indépendants parce que les employeurs se refusent à leur appliquer le statut, dont ils prétendent qu’il est exorbitant du droit commun. La réduction des frais rédactionnels et, corollaire, l’augmentation des profits sont à ce prix.
Assurance et achat d’un matériel de plus en plus sophistiqué (et donc cher) supportés par le reporter, rémunération (de plus en plus chiche) à la photo publiée, acquis sociaux non servis (le reporter n’étant pas reconnu comme salarié), mais exigences inouïes en matière de fourniture de photos de grande qualité et selon les besoins, etc., bref le quotidien du reporter-photographe est de plus en plus précaire. Aussi, pour s’assurer que les « clients » prendront les photos, le journaliste est amené à prendre de plus en plus de risque ; il ne va pas seulement là où sa conscience professionnelle lui dicte d’aller pour traquer l’information : il franchit fréquemment les limites.
La dernière lettre électronique d’Olivier Voisin à une amie italienne est, à cet égard, terriblement accusatrice ; il écrit, en effet : « Je fais les photos et je suis même pas sûr que l’AFP les prennent. » Puis, il ajoute : « Je ne suis que le petit Olivier, qui crève la dalle avec eux (les insurgés, NDLR) et qui les emmerde car les combats directs se font attendre. Le problème, c’est ce que demande l’AFP. Moins j’en fais, moins je gagne aussi et ce que je gagne c’est déjà pas fabuleux et plus les jours passent c’est autant de photos qu’on me demande de faire que je ne fais pas. »
Le SNJ-CGT salue la mémoire d’Olivier Voisin. Pour honorer sa mémoire et celle des autres journalistes morts en zone de conflit (et notamment, les reporters-photographes), le SNJ-CGT continuera à œuvrer pour la résorption de la précarité et l’application du statut de journaliste à tous, sans exception.
Le lundi 25 février 2013