[Reprise] Un travail sans limite ?

Le patronat en rêve et le gouvernement lui en accorde la possibilité. Reste le principe de réalité…

L’ordonnance est parue le 15 avril. Prise dans le cadre de la loi sur l’état d’urgence sanitaire, elle annonce l’obligation qui peut être faite désormais à tous les fonctionnaires – enseignants et agents de la fonction publique hospitalière exceptés – d’abandonner, par effet rétroactif, cinq jours de congé pour la période allant du 16 mars au 16 avril et d’en prendre cinq autres d’ici « la reprise de leur service dans des conditions normales ».

Cette décision est passée quasiment inaperçue. Son message est pourtant capital. Pour faire face à la pandémie, le gouvernement demande désormais à tous les salariés, qu’ils relèvent du public ou du privé, d’abandonner jusqu’à dix jours de repos tandis qu’aux entreprises il n’impose qu’une seule contrainte : celle de ne pas distribuer de dividendes si elles ont bénéficié d’aides publiques liées à la crise du Covid-19. Et qui s’émanciperait de cette règle serait simplement soumis à une amende.

Deux poids, deux mesures. On l’imagine, le président du Medef, Geoffroy Roux de Bézieux s’en réjouit, lui qui a déclaré le 10 avril qu’il faudrait, « tôt ou tard se poser la question du temps de travail, des jours fériés et des congés payés pour accompagner la reprise économique ».

Dans la métallurgie, un accord de branche a déjà été signé pour mettre en œuvre les dérogations au Code du travail que l’ordonnance du 25 mars autorise concernant la prise de congés. Dans le secteur du recyclage et celui du courtage en assurance aussi, des négociations se sont conclues en ce sens. Et ce pourrait n’être qu’un début puisque, jusqu’au 31 décembre 2020, le gouvernement a autorisé un allongement possible de la durée du travail hebdomadaire jusqu’à soixante heures dans les secteurs essentiels… Reste le principe de réalité.

Le 13 avril, après les confédérations syndicales, c’est l’ancien ministre du Travail Xavier Bertrand qui est monté au créneau pour rappeler à l’ordre les pouvoirs économique et politique : « Veut-on rendre fous les Français ? Veut-on les rendre fous de colère ? » s’est-il agacé sur Bfm-Tv. Qui aurait pensé, il y a deux mois seulement, que la procédure parlementaire concernant les deux lois portant réforme des retraites serait suspendue « jusqu’à nouvel ordre »  ?

M. H.

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