ASSISES DES INGENIEURS :
Après le 3 juillet, il est urgent de continuer à s’exprimer, et de se faire entendre !
Les assises des ingénieurs, le 3 juillet, ont confirmé l’impact des mobilisations contre les fusions de corps : « la réponse ne passe pas nécessairement par la fusion » pour la Ministre de l’Egalité des Territoires et du Logement, Mme Duflot, « la fusion à marche forcée n’est plus à l’ordre du jour » pour le Ministre de l’Ecologie, du Développement Durable et de l’Energie, M.Martin. Le gouvernement montre un intérêt stratégique marqué pour le processus de réforme des corps d’ingénieurs de l’État, avec l’intervention de 4 ministres (Ecologie, Transports, Logement et Agriculture).
Il a plus été question de la nouvelle « figure » de l’ingénieur de l’État, organisée autour du territoire avec de fortes bases techniques, pétri de sciences sociales, communiquant, « facilitateur », engagé, que de revalorisation du métier.
Le schéma a-priori répété par les ministres et les intervenants des tables rondes est celui de l’État du faire-faire. À l’exigence fortement exprimée dans les débats des assises d’exercer le métier d’ingénieur de manière directement opérationnelle, les ministères répondent en proposant des postes d’experts et de managers dans les services de l’État ayant acquis une expérience opérationnelle dans les établissements publics ou les collectivités voire… dans des « entreprises publiques d’ingénierie ? ».
La mobilité, d’autant plus importante pour les ingénieurs de l’État que leur déroulement de carrière en dépend, est évidemment décisive dans ce schéma.
Ingénierie de l’Etat ? Mme la Ministre de l’Egalité des Territoires et du Logement a voulu marquer avec énergie la fin de la discussion sur l’ADS et l’ATESAT opérées par les services de l’État, qui ne s’occuperaient plus que des zones à risques, en justifiant par le fardeau insupportable pour les agents de missions qu’ils n’arrivent plus à faire correctement et par l’inefficacité illustrée par la catastrophe de la Faute-sur-Mer (tempête Xynthia) !
La Gestion Prévisionnelle des Emplois des Effectifs et des Compétences (GPEEC) des ingénieurs, les mobilités et la mise en réseau des Écoles seront donc les outils principaux de ces réformes.
Pour la CGT, le poids donné à la technicité dans les débats, et l’abandon, (relatif, cependant), des objectifs de fusions de corps doivent beaucoup à la mobilisation des personnels et représentent des résultats appréciables des actions menées et de la prise de parole des ingénieurs.
Cependant les propositions faites interrogent sur la capacité de mettre en œuvre les métiers d’ingénieurs dans de bonnes conditions.
Dans ces assises se dessinent de nouveaux passages obligés entre « faire » et « faire-faire » et de nouvelles barrières dans un contexte de réduction des moyens et des effectifs, de développement de l’externalisation et des PPP. Est-ce porteur d’avenir pour répondre aux exigences de la transition énergétique, de l’aménagement du territoire, du développement de l’emploi, etc ?
Les corps d’ingénieurs de l’Etat doivent être développés, bien formés, reconnus dans leurs qualifications, pour être capables d’assumer activité opérationnelle et le rôle de stratège de l’État, en mettant en valeur leur technicité et toutes les facettes de leur métier d’ingénieur. La présence d’ingénieurs des corps de l’État dans les établissements publics et les collectivités doit permettre de conforter les moyens de ceux-ci et de développer les coopérations.
Le chantier de la GPEEC doit répondre effectivement à la question des besoins à satisfaire : les réponses ne peuvent partir d’un a-priori sur la fin du « faire » dans l’État.
En finir avec les freins absurdes aux mobilités est effectivement urgent. Cela suppose aussi des recrutements et des moyens, de la formation initiale et continue, la reconnaissance de la disponibilité demandée. La politique de l’ingénieur rare et de diminution des effectifs de l’Etat conduit aux blocages administratifs et à l’inefficacité, à des charges de travail excessives et des postes vacants. Cela doit changer !
La promotion des techniciens doit être amplifiée. L’accès des femmes aux métiers d’ingénieur, encore très insuffisant aujourd’hui, demande des évolutions en terme d’image, de condition d’exercice du métier.
La reconnaissance de la qualification des ingénieurs et des métiers d’ingénieurs de l’État est une question urgente alors que les écoles connaissent des difficultés de recrutements d’élèves-ingénieurs.
La CGT demande un début de carrière à deux fois le SMIC, (revendiqué à 1700€ brut). Les propositions faites pour les écoles doivent participer de cette revalorisation. Il faut leur en donner les moyens et stopper la diminution des effectifs et des moyens des écoles! L’excellence scientifique et technique en reste le cœur. La formation sociale et sociétale, juridique, économique prend une nouvelle importance . Quel sens va-t-on donner à ces formations ? Comment les valoriser ?
Le métier d’ingénieur évolue : parlons aussi de rôle contributif des ingénieurs aux décisions, de véritable droit d’exprimer des points de vue professionnels contradictoires, de valorisation réelle de l’avis technique dans les décisions et le débat public. Au delà de la « posture du doute » n’est-ce pas le besoin urgent de débat non corsetés, en particulier par les dogmes budgétaires, d’ouverture à des solutions plus originales qui s’exprime?
Le 3 juillet, les ingénieurs ont sans doute été écoutés. Il faut maintenant les entendre.
Montreuil, le 12 juillet 2013