Un nouveau quinquennat pour gagner l’égalité ?
Le 7 mai, Emmanuel Macron remportait l’élection présidentielle. Le 2 mars, il déclarait qu’au-delà des 6 chantiers de son programme, «L’égalité entre les hommes et les femmes sera une cause nationale». Rappelant la règle des 20 (environ 20% de tâches ménagères accomplies par les hommes, 20% d’écart de salaires, 20% de femmes parlementaires…), il déclinait 10 propositions en 3 priorités dans son projet présidentiel : aider les femmes à concilier leur vie familiale et leur vie professionnelle ; permettre aux femmes de mieux vivre de leur travail ; lutter plus efficacement contre le harcèlement et les violences faites aux femmes.
Si les engagements sont louables, les restrictions à venir sur les finances publiques et au sein de la fonction publique risquent de peser lourd… Alors que M. Macron annonce 20 milliards d’€/an de baisses de taxes et de cotisations sociales, 50 000 suppressions de postes et 60 milliards d’€ de baisse des moyens budgétaires dans la fonction publique d’Etat, nous avons tout à craindre pour les progrès de l’égalité.
Mais plus globalement, son objectif de poursuite du démantèlement du code du travail et des 35 heures et sa stratégie d’évitement du rapport de force politique et syndical (légiférer par ordonnances et négociations au niveau des entreprises avec inversion de la hiérarchie des normes) sont sans ambigüité sur sa volonté de revenir sur les conquêtes sociales issues de longues luttes. L’égalité entre les femmes et les hommes n’est pas compatible avec la remise en cause des conquêtes sociales, comme l’ont démontré la reforme des retraite de 2013 ou la loi El Khomri en 2016.
Au contraire, stéréotypes et temps sociaux différents entre femmes et hommes, individualisation et flexibilité augmentent les inégalités dans l’emploi, les salaires, la carrière et les retraites.
Le temps des femmes n’est pas celui des hommes…
C’est ce que démontrent encore les études récentes: le tableau de bord 2017 de l’observatoire des inégalités indique que les femmes consacrent en moyenne 3H26 au travail domestique contre 2H pour les hommes, un écart qui s’amplifient avec l’arrivée des enfants.
Leur espérance de vie atteint 85,4 ans contre 79,3 pour les hommes, les plaçant en première ligne des enjeux liés à la retraite.
Elles sont presque 3 fois plus nombreuses à subir un temps partiel, ce qui pèse sur les écarts salariaux (les hommes gagnent 34,5% de plus qu’elles). Et les jeunes femmes subissent plus la précarité que les jeunes hommes.
Les femmes du périmètre ministériel se sont exprimées sur le temps de travail et l’articulation des temps, notamment lors de la consultation OFICT-CGT de 2016 et dans le cadre de la campagne UGICT-CGT #VieDeMère menée en février-mars 2017 notamment par le syndicat CGT Administration Centrale ! Elles sont plus favorables à l’encadrement du temps de travail, sur le lieu de travail ou au moyen du numérique.
Elles subissent plus que les hommes le dogme du présentéisme sur leurs perspectives de déroulement de carrière et la maternité est parfois différée car perçue comme incompatible avec le niveau de responsabilité ou une difficulté à surmonter pour faire carrière.
Etre une CGT qui s’empare de l’égalité
Chausser les lunettes du genre, quel que soit le domaine revendicatif, dans nos analyses, dans nos modes d’action et au travers de la syndicalisation et de la représentativité : c’est à la fois un enjeu de progrès social, sociétal et syndical. Voici quelques pistes pour mener ce combat :
Durée du temps de travail | |
faire respecter et défendre la durée légale des 35H :
• exiger le respect des garanties minimales • s’opposer à l’extension des forfaits-jours • décompte des heures en télétravail • revendiquer l’abaissement du temps de travail à 32h hebdomadaires |
⇨ données sur l’état du respect des garanties minimales dans les bilans sociaux ⇨ S’appuyer sur l’instruction ministérielle RTT de 2011 ⇨ S’approprier le matériel confédéral et ugict sur les 32h |
Charges de travail | |
• Exiger son évaluation formalisée
• Revendiquer des mesures correctrices en cas de surcharges régulières • Reconnaissance formalisée des intérims |
⇨ En s’appuyant sur les CHSCT ⇨ Estimer les besoins de recrutements ⇨ Agir pour que tous les postes vacants soient publiés |
Articulation des temps | |
Maternité / parentalité
• Faire respecter les droits et facilités prévues pour les femmes enceintes • Exiger des dispositifs de remplacements temporaires pour couvrir les absences prévisibles • Encourager la parentalité • Agir pour développer l’offre de garde d’enfant, collective ou individuelle • Refuser les effets de com’ |
⇨ Application des aménagements horaires ⇨ Travail avec les agent.es du service concerné et Interpellation de la DRH ⇨ Aider les hommes qui le souhaitent à travailler à temps partiel et à prendre leur congés parental ⇨ mobiliser l’action sociale ⇨ ex : s’opposer aux engagements non contraignants type chartes des temps |
Salaire et carrière | |
• Prendre en compte les contraintes particulières des femmes à l’accès à la formation
• neutraliser les effets des périodes d’inactivité forcée sur la progression de carrière et la rémunération |
⇨ Agir pour une offre locale de formation avec les commissions formation
⇨ Revendiquer des moyens en cas de difficultés familiales ⇨ Informer et conseiller les agent.es sur leur régime indemnitaire, la promotion, le contenu de leur travail. |
Luttes contre les stéréotypes et les discriminations | |
• Obtenir une concertation effective à tous les niveaux sur les inégalités et les moyens de les supprimer
• Disposer des éléments de connaissance • Exiger des formations sur les questions d’égalité pour lutter contre les stéréotypes • Exiger un bilan de la charte ministérielle 2014-2017 |
⇨ Interpeller les référent.es Egalité professionnelle du réseau ministériel
⇨ Exiger des bilans et études et rapports genrés : comité technique, commission paritaire, réunions de concertation |
Avec l’évolution des effectifs sur le périmètre ministériel (rajeunissement et féminisation, départ d’une majorité d’hommes en retraite), les femmes sont un enjeu revendicatif prioritaire. L’obligation de parité sur les listes électorales de décembre 2018 est un point d’appui pour leur permettre de faire valoir leurs préoccupations et aspirations. Leur engagement dans l’activité syndicale et au sein de la CGT serait un atout pour obtenir de nouvelles conquêtes sociales.