Un an tout juste après s'être fait réélire en se flattant d'avoir remis l'AFP sur de bons rails et ouvert des chantiers d'avenir, le Pdg Emmanuel Hoog tente de nous faire croire que le salut de l'agence passe obligatoirement par des sacrifices du personnel à grande échelle.
Censées introduire "transparence" et "équité" dans les relations sociales internes et harmoniser les droits sociaux autour d' "un socle commun", les discussions engagées à l'automne entre la direction et quelques organisations syndicales viennent enfin d'accoucher d'un moment de vérité : jeudi 3 avril, Emmanuel Hoog a donc exposé à des "partenaires sociaux" sa plate forme revendicative, à la façon du Medef dans les négociations sociales nationales.
En résumé, les salariés sont priés de payer la note du désengagement financier de l’État et des fautes de gestion de la direction.
A vrai dire, le scénario était écrit et connu depuis des mois, puisque l'objectif assigné à ces pourparlers - on n'ose parler de négociations - était d' "assurer la maîtrise de la progression des charges", dans une entreprise de main-d’oeuvre où les dépenses de personnel représentent 75% du total des dépenses.
Commandé par le gouvernement, le rapport Françaix - dans sa version de "rapport d'étape" fin 2013 - annonçait on ne peut plus clairement la couleur. "La redéfinition du cadre conventionnel doit permettre des économies sur la masse salariale", écrivait le député.
Encore faut-il, pour passer aux actes, que le plan de la direction se transforme en accord d'entreprise. Cela ne dépend que de nous, les organisations syndicales. Pour faire avaler ses projets, la direction a besoin de l'accord de syndicats représentant 30% du personnel ET que les organisations représentant 50% des salariés ne fassent pas jouer leur droit d'opposition reconnu par la loi.
La CGT - comme d'ailleurs toutes les organisations syndicales - n'était pas demandeur d'une convention d'entreprise se substituant aux accords existants. Pas plus aujourd'hui qu'hier, elle n'entend participer à un simulacre de négociation sur les revendications de la direction. Il est hors de question pour nous de nous prêter à une attaque ouverte des droits des salariés, à la potion austéritaire concoctée au 7e étage.
D'autant que la condition des salariés de l'AFP n'a cessé de se dégrader toutes ces dernières années :
- Nous perdons du pouvoir d'achat. Sans même parler d'un certain nombre d'indemnités gelées au même niveau depuis des années, les revalorisations des salaires pour tous sont inférieures à l'inflation, quand elles ne sont pas inexistantes, comme en 2013. Pour 2012, la direction a refusé d'appliquer
intégralement l'accord salarial de la presse nationale, nous privant d'une hausse de 0,9% de l'indice du salaire de base. Nous venons de saisir la justice pour faire reconnaître l'illégalité de la décision de la (...) direction de l'AFP. Nous avions d'ailleurs fait du règlement de cette question le préalable à notre
participation aux discussions.
- La précarité de l'emploi s'est aggravée dans toutes les catégories, notamment à l'étranger et pour les vidéastes.
Si elles devaient se concrétiser, les préconisations de la direction - ce qu'elle appelle ses "hypothèses de travail" - constitueraient un énorme recul pour chacun d'entre nous : perte de 8 à 14 jours (selon les catégories) de congés annuels, suppression des RTT pour certains salariés... Ultime provocation, les expatriés n'auraient plus droit aux RTT, alors que chacun sait qu'ils triment plus que d'autres et ont parfois bien du mal à prendre deux jours de repos hebdomadaire.
Et en échange de ces sacrifices, on nous promet des salaires à la tête du client et des augmentations salariales pour tous dérisoires (rendez-vous compte : 0,5% de hausse générale "coûte" 700.000 euros par an, nous dit la direction).
Ces propositions n'ont aucune chance de passer. Et pour cause : le personnel fait moins confiance que jamais à cette direction et au Pdg Emmanuel Hoog. Partout et sauf pour une poignée de nantis, c'est déjà l'austérité : réductions drastiques des piges et missions dans la rédaction, postes non pourvus pendant plusieurs semaines ou plusieurs mois, effectifs partout calculés au-dessous du seuil nécessaire. Résultat, on travaille de plus en plus, de plus en plus intensément et pour des salaires qui baissent en termes réels. Et pour ce qui est de la reconnaissance, on repassera...
On vient nous dire aujourd'hui que les responsables des difficultés de l'AFP, c'est nous, parce que nous coûterions trop cher !
Mais ce n'est pas nous qui négocions à la baisse les tarifs d'abonnement à l'AFP, ce sont les banques et les grands groupes financiers, qui exigent toujours plus de rentabilité des journaux dont ils se sont emparé.
Ce n'est pas nous non plus qui avons décrété qu'il fallait réduire les fonds publics à l'AFP et les limiter tout au plus au financement de missions d'intérêt général strictement contingentées. Ça, c'est la responsabilité de l'Union européenne et du gouvernement français.
Ce n'est pas nous non plus qui avons engagé l'AFP dans un vaste et dispendieux programme de travaux de rénovation du siège de l'agence, travaux qui se terminent bizarrement en même temps que le PDG nous demande d'en payer la note avec son "grand accord d'entreprise".
Ce n'est pas nous qui, moyennant finances (coût de location d'une salle, etc.) convoquons chaque trimestre tous les responsables de la maison pour un exercice de communication du Pdg (les fameux CCI).
Ce n'est pas nous non plus qui décidons des promotions TGV aux favoris de l'équipe de direction.
Voilà pourquoi nous disons au personnel : Non, vous n'êtes pas coupables !
Voilà pourquoi nous pensons que les organisations syndicales ont la responsabilité de dire ensemble : M. Hoog, votre plan, on n'en veut pas !
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