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CGT AFP Affaire Morel: non à l'impunité, la direction doit s'expliquer

Un scandale, un vrai scandale, pour le coup. Par la faute d'un haut responsable de l'agence, l'AFP va devoir débourser au bas mot 1,2 million de dollars pour indemniser un photographe spolié dans ses droits d'auteur. Non seulement il n'y a pas de sanction à l'encontre du fautif, mais il a été bombardé entretemps chef du département Sports. Vous savez, celui qui, comme par hasard, vient de présenter à la presse la nouvelle "offre Sports" de l'AFP. Au même moment, parce que ça coûterait trop cher, la direction bloque les salaires et veut supprimer des jours de congé.

Ainsi que le rapporte une dépêche AFP du 22 novembre datée de New York, un jury américain a accordé vendredi 1,22 million de dollars de dommages et intérêts à un photographe haïtien, Daniel Morel, après avoir estimé que l'AFP et Getty Images (distributeur des photos AFP aux Etats-Unis) avaient sciemment violé ses droits d'auteur en 2010. Et c'est sans compter les frais annexes (avocats, etc.). Pour l'ensemble de ces frais, certains avancent même un montant nettement plus important à partager entre l'AFP et son partenaire étatsunien.

Cette condamnation va plomber les finances de l'Agence, qui n'en avaient pas besoin comme chacun sait. Mais aussi ternir son image (il suffit de surfer sur l'internet ou sur Twitter pour le mesurer).

En cause: huit photos du tremblement de terre en Haïti en janvier de cette année-là (250.000 morts) prises par Morel qui les avait mises ensuite sur son compte TwitPic. Les clichés avaient été d'abord retweetés par un certain Lisandro Suero, résident de la République dominicaine, puis diffusés sur les fils de l'AFP à l'initiative du coordinateur photo pour l'Amérique du nord.

Dès qu'un éditeur basé à Paris s'est rendu compte de la bévue, il a prévenu le coordinateur photo à Washington. A la demande de ce dernier, une correction de légende a été aussitôt transmise à l'ensemble des clients pour attribuer les photos à Morel. Mais sans pour autant les "tuer". Les images sont restées plusieurs heures sur les fils sans l'accord de Morel que le coordinateur photo tentait de joindre désespérément. "Pour l'aider" a-t-il plaidé lors de son audition.

 

L'HOMME QUI A MAL VU

 

La CGT a pu consulter les minutes du procès. Le principal témoin, qui a diffusé les photos sans le consentement de l'auteur, a été entendu par le tribunal de New-York le 15 novembre durant huit heures. L'homme a mal vu, dit-il. A mal vu les photos. A mal vu les règles. A mal vu les mails. A tout mal vu.

En réponse aux questions précises de l'avocat de Morel citant cinq points du guidelines de l'AFP sur la vérification des sources et l'utilisation des images en provenance des réseaux sociaux, notre homme, pourtant en charge de hautes responsabilités au service photo depuis plus de dix ans, reconnaît n'avoir pas respecté les règles de l'Agence avec pour seuls arguments, "J'étais trop occupé", "Je n'étais pas familier avec Twitter".

Et malgré "sa bonne connaissance d'Haïti" ("J'y suis allé deux fois en vacances"), il avoue même avoir diffusé délibérément le même jour une photo d'un tremblement de terre en Chine accompagné d'une légende affirmant qu'il s'agissait d'une photo d'Haïti. "C'était une faute", admet-il, "je me suis excusé pour cela" (sic). Oui, mais auprès de qui ?

Dans un jugement rendu le 14 janvier dernier, le tribunal de New York avait déjà condamné l'AFP pour "violation des droits d'auteur" et contrefaçon (cf. notre communiqué du 20 février 2013 intitulé "Affaire Morel: la direction invente l'auto-absolution" sur le site.

Vendredi dernier, le tribunal a estimé que la violation des droits d'auteur était intentionnelle, et que le préjudice était tel que des dommages et intérêts de 1,22 million de dollars devaient être alloués au plaignant.

Autrement dit, une faute grave a été commise. En droit français, quand un salarié a commis une "faute grave" ou "une faute lourde", pour reprendre les termes du code du travail, il s'expose à une sanction proportionnelle. Or, non seulement ce responsable régional n'a fait l'objet d'aucune mesure disciplinaire, mais il a été promu deux ans plus tard chef du département Sports, ce qui revient à le remercier des éminents services qu'il avait rendus à l'agence en la circonstance. Un comble! Et cela alors même que la direction savait parfaitement que l'affaire risquait de se conclure par une condamnation de l'AFP - "Cette histoire risque de nous coûter très cher", s'était alarmé le directeur général adjoint Jean-Pierre Vignolle lors d'une réunion du comité d'entreprise.

La CGT dénonce depuis des années le caporalisme et l'intimidation avec convocations et sanctions à la clef pour des broutilles, et même des licenciements, tandis que d'autres jouissent de la protection de la direction.

L'ex-responsable photo Amnord n'en est pas à son coup d'essai. C'est même un maître du genre (avec les promotions qui vont avec). Rappelons-nous de l'affaire Rezala en 1999 et de l'affaire des photos corses en 2005, ponctuées de motions de défiance votées par le personnel. Qu'ont fait et qu'ont dit le directeur de l'Information et la Photo internationale (cette dernière a été promu à de plus hautes fonctions depuis), qu'on peut supposer avoir été alertés du vol des photos ? Ils ont couvert ! Et encore promu !

La CGT fait un calcul simple. La direction a refusé de payer aux salariés les 2 paliers de l'accord SPQN de 2012 afin de provisionner les dépenses liées au procès. Si elle avait appliqué l'intégrité de cet accord, elle aurait versé 600.000 euros au personnel. Soit environ moitié moins que les 1,2 million de dollars ordonné par le juge.

1,2 million de dollars, c'est, d'autre part, plus de la moitié de la provision annuelle de l'AFP pour les congés payés (2,2 millions d'euros selon la direction).

 

Dans ces conditions, la direction est disqualifiée aujourd'hui pour demander au personnel des sacrifices dans le cadre de la négociation qu'elle propose.

 

La conclusion est limpide: que la direction commence par faire le ménage dans ses rangs et s'explique devant le personnel.

 

CGT toutes catégories

PARIS, 26/11/2013

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