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Le statut de l'AFP à nouveau sur la sellette

 

La nouvelle ministre de la Culture, Mme Fleur Pellerin, a annoncé le 11 septembre "une prochaine proposition de loi sur la presse incluant une réforme du statut de l'AFP", sur la base du rapport de Michel Françaix. Elle a également affirmé (pas de modification du statut nécessaire sur ce point, selon Françaix) que "tout sera fait pour que la filiale technique proposée" (par le député PS) "voit le jour début 2015".

 

Si la ministre n'évoque que des réformes de gouvernance (conseil d'administration, conseil supérieur, durée de mandat du PDG, dont on peut discuter l'utilité), les dangers de changements de nature législative sont nombreux dans un contexte où les lobbies prônant la déréglementation tous azimuts sont à la manoeuvre, pour le meilleur profit de la grande finance.

 

Ceci est d'autant plus inquiétant que l'article 14 (qui protège l'agence de la faillite) a été mis sur la sellette dans des échanges entre le gouvernement et la Commission européenne.

 

Malgré les efforts des syndicats, la direction de l'AFP et le gouvernement ont cru bon de tenir les représentants élus du personnel à l'écart des discussions sur ces projets comme sur le contenu du COM afférant qui serait en cours de négociation, en toute opacité.

 

Lors de notre dernier rendez-vous à Matignon, en juillet, nous n'avons obtenu aucune information. Tout comme lors des réunions du comité d'entreprise où la direction esquive systématiquement les questions des élus. "Quand c'est flou, c'est qu'il y a un loup" dirait une dirigeante socialiste.

 

La CGT, avec les autres syndicats, a demandé à rencontrer Mme Pellerin et les présidents des commissions de la Culture de l'Assemblée et du Sénat.

Mais cela ne suffira pas. C'est au personnel, journalistes, techniciens, administratifs, de se mobiliser pour faire entendre sa voix sur des décisions qui concernent son avenir, celui de l'AFP et de son indépendance.

Présentée dans le rapport comme un décision ne nécessitant pas de toucher au statut, la filiale technique proposée par M. Françaix mettrait pourtant sérieusement à mal cette indépendance.

 

Une filiale qui menace l'indépendance de l'AFP

 

Le rapport Françaix propose, non pas de transformer l'AFP en entreprise à capitaux, mais de créer une filiale technique qui, elle, aurait des actionnaires. L'objectif est de permettre un plan d'investissement de 34 millions d'euros. Il faut rappeler que jusqu'à très récemment, l'État aidait l'AFP quand elle avait besoin d'investissements lourds. Ce fut le cas pour la création du service photo dans les années 80. Mais le financement du nouveau système technique, pourtant prévu dans le précédent Contrat d'objectifs et des moyens (COM), a été transformé en prêt... à un taux de 5,28% !

 

Michel Françaix assure que cette filiale ne sera pas une "entité économique autonome" et que donc, il n'y aura pas de transfert de personnel. Toutes les craintes sont cependant permises quant aux conséquences d'un tel projet pour le personnel technique de l'AFP.

 

Dans le schéma proposé par le député de l'Oise, l'AFP serait le principal actionnaire de sa filiale, la dotant en capital "en y transférant un certain nombre d'actifs", comme le système de transmission IRIS, évalué à 28 millions d'euros, mais peut-être aussi d'autres outils techniques : matériel vidéo, système informatique commercial, etc. Un ou des investisseurs du secteur financier public entreraient aussi dans le capital (Caisse des Dépôts et Consignations ou Banque Publique d'Investissement) à hauteur de huit millions d'euros. Et la filiale devrait emprunter entre 23 et 28 millions. La société ainsi créée louerait à l'AFP les moyens techniques contre paiement d'une redevance.

 

Michel Françaix précise que le futur COM, encore en négociation, devra intégrer ces projets. Et qu'il appartient à l'État de superviser "la réalisation du plan d'affaires et du COM dans son ensemble" et "notamment du retour sur investissement de la filiale". Celle-ci devra "faire face à ses charges, notamment à la rémunération de ses actionnaires et au remboursement de ses prêteurs."

 

Que se passerait-il alors si la filiale en question, non protégée de la faillite par le statut de 1957, ne pouvait pas rémunérer ses actionnaires ou rembourser ses créanciers ? L'ouverture du capital à des entreprises privées mettrait à mal l'esprit et la lettre de la loi de 1957 sur l'indépendance de l'AFP et ouvrirait le chemin à une privatisation. Autre possibilité : la faillite. L'AFP serait alors privée de tout moyen de travailler.

 

Trésorerie exsangue, endettement historique

 

L'hypothèse n'est nullement fantaisiste. On sait que les prévisions de progression du chiffre d'affaires de l'agence avancées par la direction dans les actuelles négociations sur le COM sont plus qu'optimistes. Sous l'actuelle direction, la situation financière de l'AFP n'a pas cessé de se dégrader. Sa trésorerie est exsangue et son niveau d'endettement historique. L'agence n'est plus propriétaire de son siège, mis en crédit-bail. En 2013, son chiffre d'affaires est en recul et, malgré une stabilité des frais de personnel, l'équilibre des comptes n'est dû qu'à la cession d'actifs ( des bureaux de l'étranger). Le seul patrimoine que possède aujourd'hui l'AFP est son savoir-faire et son outil technique.

 

L'indépendance de l'AFP n'est pas seulement rédactionnelle. C'est aussi l'indépendance de l'ensemble des outils techniques nécessaires à la production et à la transmission de l'information qu'elle produit. La CGT a toujours demandé un mécanisme de financement pérenne pour l'Agence. L'introduction dans la loi de sa mission d'intérêt général avait été présentée comme la solution pour continuer à recevoir un soutien de l'État. Aujourd'hui, ce soutien est remis en cause par la Commission européenne au nom du sacro-saint principe de la libre concurrence, malgré la reconnaissance de la mission d'intérêt général. Pourtant, dans son rapport d'étape, le député Françaix reconnaissait que l'AFP est un "fer de lance de l'exception culturelle".

 

Mais Bruxelles a bon dos. Lorsqu'il n'y a pas de volonté politique, le "c'est pas moi, c'est Bruxelles" demeure la solution de facilité. Nous l'avons assez dit : l'AFP existe parce qu'il y a eu la volonté politique de créer une agence dont la mission est de donner une information objective, impartiale et exhaustive. Son existence est un enjeu pour une information pluraliste en France et dans le monde. Donc pour la démocratie et le droit des citoyens.

Le gouvernement qui déciderait de se désengager de cette mission prendrait une lourde responsabilité.

 

SNJ-CGT de l'AFP

Paris, le 17 septembre 2014 

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