1995 : l’impact du mouvement unitaire des cadres et maîtrise Cheminots

Dans les années qui ont précédé 1995 se sont développés des rassemblements et des luttes unitaires contre les privatisations dans l’industrie, dans les télécoms, face aux déréglementations dans l’énergie, mais aussi chez les jeunes avec les mobilisations étudiantes contre le CIP en 1993
En 1995, la volte-face de Chirac qui, après s’être fait élire sur le thème de la fracture sociale, donne libre cours à des mesures ultralibérales, crée un mécontentement et un malaise profond dans tout le pays.
La rentrée de septembre 1995 voit émerger un bouillonnement revendicatif. Les fonctionnaires entrent dans la danse contre le gel de leur salaire. Le plan Juppé cristallisera un mouvement de grève sans précédent que les syndicalistes américains de l’AFL-CIO qualifieront de première levée en masse contre l’ultralibéralisme dans le monde.
Parmi les éléments déclencheurs, le rôle joué par les cheminots et singulièrement par les cadres et maîtrise doit être souligné.
Leur puissante mobilisation unitaire dès octobre ayant amplifié la dynamique de lutte chez les ouvriers et employés. Appuyées par leurs fédérations, les unions fédérales UFCM CGT, UFC CFDT, UNCMT FO, UFCMT CFTC, FMC et CFE–CGC ont élaboré une plate-forme revendicative pour la reconnaissance des qualifications, leurs carrières et leurs missions. Un rassemblement national a lieu le 12 octobre 1995. Cette manifestation unitaire spécifique est une première ; elle est préparée sur le terrain par des tournées unitaires.
Le succès de la mobilisation est au rendez-vous. « Le sort de l’encadrement ne passera que par l’unité » clame le responsable CGC. Les débats viennent sur les méthodes de management entraînant celui sur les moyens de fonctionnement de la compagnie ferroviaire. L’attachement à la culture cheminote de service public ressort avec force dans l’encadrement. Options publie une table-ronde réunissant toutes les organisations cadres des cheminots.
L’impact psychologique est également réel dans les autres catégories de personnels. « Si même les cadres s’y mettent ! » « On ne peut pas être en-dessous. »Le 24 novembre, l’ensemble des organisations syndicales appelle à la grève pour la renégociation du contrat de plan et le retrait du plan de réforme de la protection sociale. Les débrayages sont massifs.
La résonance de la mobilisation des cheminots est immense.
La participation des cadres et maîtrises à la grève fait un bon significatif. Le mouvement est reconduit. Le plan Juppé sur la protection sociale joue le rôle de détonateur de mécontentements multiples, aiguise les inquiétudes et exacerbe les tensions. Le retour en masse de la manifestation et de la grève durant tout le mois de décembre 1995 apparaît comme un phénomène enraciné en profondeur dans tout le pays.
Des foules immenses, des millions de salariés participent à ce mouvement qui a fait de l’unité son maître mot. Le pays est paralysé pendant un mois après les manifestations du 12 décembre qui réunissent 2 millions de manifestants. Le gouvernement retire le 15 décembre sa réforme sur la retraite dans la fonction publique et les régimes spéciaux SNCF, RATP et EDF.
Les cadres ont de fait pris toute leur place dans ce mouvement d’ensemble unitaire, porteur d’un projet de société égalitaire et solidaire.  

Jean-François BOLZINGER

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